Déclaration: 11 novembre 2022 |

Discours prononcé par le Procureur de la CPI, Karim A. A. Khan KC, devant le Conseil de sécurité des Nations Unies à propos de la situation en Libye, en application de la résolution 1970 (2011)

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Statement of ICC Prosecutor, Karim A. A. Khan CK, to the United Nations Security Council on the Situation in Libya, pursuant to Resolution 1970 (2011)

Madame la Présidente, je vous remercie de l’occasion qui m’est offerte aujourd’hui d’informer le Conseil de sécurité et je tiens également à exprimer ma profonde reconnaissance au Représentant permanent de la Libye, l’Ambassadeur Taher Al‑Suni, pour sa présence.

Aujourd’hui est un jour important parce que, pour la toute première fois, un Procureur de la Cour pénale internationale prend la parole devant le Conseil depuis la Libye. C’est aussi la première fois en dix ans que le Procureur de la CPI se rend sur le sol libyen.

Je suis également profondément reconnaissant à la Mission d’appui des Nations Unies en Libye pour son soutien et je remercie le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU, Abdoulaye Bathily, pour sa généreuse hospitalité et son soutien durant la mission.

L’expérience qui a été la mienne au cours de ces derniers jours n’a fait que confirmer ce qui apparaissait déjà clairement depuis un moment, à savoir que nous devons mieux faire, que notre action doit être plus pertinente et que la justice ne peut se résumer à des valeurs ou à des concepts abstraits ; il faut que le peuple libyen puisse en ressentir les effets.

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Statement of ICC Prosecutor, Karim A. A. Khan CK, to the United Nations Security Council on the Situation in Libya, pursuant to Resolution 1970 (2011)

Nous avons rencontré des victimes de toutes les régions de Libye, de Benghazi, de Derna, des victimes de détention, de Tajura, Murzuk ou Tawergha. Et il y a de cela tout juste deux jours, je me suis rendu à Tarhuna, à deux heures de voiture de Tripoli. Là-bas, c’est une scène de désolation qui s’est offerte à mes yeux : il y avait des caisses, des caisses métalliques, comme dans un atelier. Et, d’après les témoignages, des gens ont été contraints d’entrer à reculons dans ces caisses et y ont été détenus dans des conditions absolument abominables. Des conditions qui, quel que soit le critère de jugement que l’on applique, ne peuvent être qualifiées que de traitements inhumains calculés. Et de là, j’ai emprunté la même route que celle où certaines de ces pauvres âmes ont été exécutées, pour aller dans des fermes transformées en charniers, dans des décharges, des sites d’enfouissement où des corps ont été jetés sans cérémonie. Et je crois que nous devons ici rendre hommage au réel courage dont les experts en criminalistique libyens ont fait preuve en effectuant leur travail parmi les détritus, les plastiques, et tous les déchets que l’homme peut produire, à côté des carcasses de chiens et de chèvres que nous avons vues. Ils ont effectué un travail technique extrêmement difficile en déblayant les monticules de déchets pour retrouver les corps des personnes qui avaient été jetées là. Ainsi, il semblerait que des crimes relevant de la compétence de la Cour aient été perpétrés et jusqu’à présent, 250 cadavres ont été retrouvés et très peu ont pu être identifiés. J’ai rappelé au bureau du Procureur général, au Ministre de la justice et au Service des sciences criminalistiques, que mon Bureau était prêt à travailler en partenariat, à fournir une assistance technique supplémentaire et à renforcer la capacité de la Libye en matière de criminalistique, même si, je dois bien reconnaître que j’ai été impressionné par l’énergie qu’ils ont déployée et le travail qu’ils ont accompli. Cela étant, l’ampleur de la tâche est telle qu’une assistance serait certainement nécessaire.

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Statement of ICC Prosecutor, Karim A. A. Khan CK, to the United Nations Security Council on the Situation in Libya, pursuant to Resolution 1970 (2011)

Puis, à partir des sites d’enfouissement de Tarhuna, je me suis rendu dans un autre lieu où je me suis entretenu avec des victimes et des survivants. Et autour de la table, les personnes présentes ont livré des témoignages à vous briser le cœur. Un homme a raconté qu’il avait perdu 24 membres de sa famille, me semble-t-il. Un autre, qu’il en avait perdu 15. Une mère a fait part de l’expérience éprouvante qu’elle avait vécue, avec toute la dignité dont les Libyens font très souvent preuve. Elle a raconté avoir vu des individus entrer chez elle par effraction et lui arracher ses fils qu’elle n’a plus jamais revus. Un père a raconté en toute simplicité – ce qui était d’autant plus poignant – qu’il ne supportait plus de vivre chez lui parce que c’était là que ses enfants étaient nés. Et que son foyer lui rappelait chaque jour le traumatisme de les avoir perdus. Voilà les histoires déchirantes et le genre de souffrances que les survivants nous racontent. Voilà pourquoi l’initiative du Conseil de déférer la situation en Libye à mon Bureau, conjuguée au travail que nous accomplissons et à l’obligation qui nous incombe collectivement de rendre justice représentent bien plus qu’une idée abstraite, et revêtent une importance cruciale.

Un sentiment de lassitude s’est installé au sein de la population libyenne, que l’on pourrait résumer en ces quelques mots : « Nous avons déjà entendu ces promesses ». Que fait la communauté internationale ? Que faites-vous à la CPI ? Nous entendons parler de justice mais où sont les actes concrets ? Où sont les résultats ? Un survivant a déclaré : « On n’arrête pas de nous parler de justice, on n’arrête pas de nous parler de la CPI. Où sont les résultats ? Il faut que ces promesses deviennent réalité. » Et je crois que ces sentiments sont tout à fait justifiés. L’année 2011 est loin de nous et les souffrances ne cessent de croître. Nous devons démontrer à la population que nous pouvons changer le cours des choses. Et le message relayé ne concerne pas uniquement Tarhuna ; j’ai entendu des témoignages similaires de la part de victimes de toutes les régions de Libye. Mon équipe a également mené des activités d’enquête et, que l’on vienne de Tripoli, de Benghazi, de Misrata ou d’ailleurs, les récits qu’elle a recueillis sont encore plus poignants.

Les victimes veulent que la vérité éclate. Elles veulent être entendues. Et elles veulent que des juges se prononcent en toute indépendance et impartialité sur les allégations portées. À vrai dire, je comprends tout à fait leurs frustrations et elles ont ma plus grande sympathie. Voilà pourquoi, dans mon précédent rapport, en avril dernier, j’avais mis l’accent sur un nouveau plan d’action qui, espérons-le, devrait produire plus de résultats et accroître la transparence de nos activités. Nous ne pouvons pas laisser s’installer le sentiment que l’impunité est inéluctable. En avril dernier, j’avais évoqué les ressources supplémentaires allouées à l’équipe chargée de la situation en Libye et j’avais fait état d’une présence accrue sur le terrain et de la volonté de mener des enquêtes dynamiques pour être en mesure de fixer, avec un certain degré de transparence, des objectifs mesurables. Aujourd’hui, j’ai le plaisir d’annoncer, ainsi qu’il est indiqué dans le rapport que vous avez sous les yeux, que nous avons bien progressé dans la mise en œuvre de cette nouvelle approche, et ce, en grande partie grâce au partenariat que nous nous employons à renforcer.

Pour la première fois depuis 2011, je suis en mesure de vous faire part d’une présence régulière de membres de mon Bureau dans la région. Au cours de la dernière période considérée, nous avons effectué vingt missions dans six pays au cours desquelles des éléments de preuve variés ont été recueillis : des images satellite, des déclarations de témoins ou encore des enregistrements sonores. Notre engagement en faveur d’un renforcement du dialogue s’est concrétisé de plusieurs manières : en juin notamment, lorsque la Procureure adjointe Nazhat Shameem Khan s’est rendue en Libye pour y rencontrer des responsables gouvernementaux et des représentants de la société civile – de telles rencontres ont également eu lieu à La Haye, à Tunis et ailleurs.

En septembre, nous avons rejoint une équipe commune d’enquête sur la traite des êtres humains. Je pense qu’il s’agit là d’une étape très importante s’inscrivant dans la lignée du travail considérable accompli par l’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord, ainsi que par Europol. Et il ne s’agit pas d’un partenariat de façade, qui aurait pour unique vocation de nous permettre de cocher une case pour démontrer que nous établissons des partenariats. Il porte déjà ses fruits puisqu’il y a quelques semaines de cela, en octobre, le travail de l’équipe commune d’enquête a rendu possible le transfert de l’Éthiopie vers l’Italie et le Royaume des Pays-Bas de suspects appelés à rendre des comptes devant des tribunaux nationaux pour avoir joué un rôle clé dans le trafic d’êtres humains. Il appartiendra aux tribunaux nationaux de déterminer s’il convient également de porter des allégations relatives  à des actes de torture et d’esclavage en termes généraux à l’encontre de ces individus. Et cet exemple illustre bien les propos que je n’ai eu de cesse de répéter, à savoir que, selon moi, la Cour pénale internationale n’a pas vocation à devenir la plus haute instance judiciaire mais bien à jouer un rôle charnière aux côtés des instances judiciaires nationales. Nous devons unir nos efforts pour que l’impunité perde du terrain et amener plus de personnes à rendre compte de leurs actes.

En avril, j’ai également présenté plusieurs objectifs à atteindre pour mon Bureau, notamment notre volonté d’intensifier notre action, de mener des enquêtes fiables et, le cas échéant, de présenter des demandes de délivrance de mandats d’arrêt en s’appuyant sur des preuves solides. Aujourd’hui, je peux annoncer que d’autres demandes de délivrance de mandats d’arrêt ont été présentées aux juges indépendants de la CPI. Cela étant, elles restent confidentielles pour l’heure, et c’est aux juges de la CPI qu’il revient de se prononcer. De ce fait, je ne suis pas en mesure de fournir plus de détails. Toutefois, à l’avenir, nous présenterons d’autres demandes, parce que les victimes veulent des actes concrets et que les éléments de preuve sont disponibles. Il nous appartient d’obtenir les ressources nécessaires, d’accorder la priorité à la situation en Libye et de mettre en œuvre la promesse faite dans la résolution 1970 du Conseil de sécurité. Et, à mon humble avis, cette approche constitue le nouveau modèle à suivre pour mon Bureau.

Le nouvel élan qui semble transparaître dans le rapport n’est pas seulement le fruit des activités menées par le Bureau de son côté. La Libye est un partenaire essentiel. Nous sommes en Libye. Ce pays appartient aux Libyens et la grande majorité des crimes qui ont été commis l’ont été contre des Libyens. Ce partenariat que nous essayons de redéfinir, d’établir et de consolider est absolument crucial si nous voulons faire bouger les choses. Demain, je rencontrerai des représentants de la société civile de différentes régions de ce pays. Et la semaine prochaine, des membres de la société civile libyenne se joindront aux experts et à des représentants de la société civile du monde entier autour d’une table ronde que nous tiendrons à La Haye sur la thématique des crimes commis contre les enfants ou ayant un impact sur eux. Il faut néanmoins souligner toute l’importance de la coopération et en particulier, Madame la Présidente, du travail accompli par Mohamed Younis Menfi, le Président du Conseil présidentiel libyen. Sans son rôle moteur, son autorité et l’aide qu’il m’a apportée pour faciliter certaines démarches, je ne pourrais pas me trouver en Libye, aujourd’hui, pour informer le Conseil.

La coopération n’est pas parfaite. Nous avons évoqué en détail les problèmes auxquels nous avons été confrontés et j’ai eu des échanges francs avec les représentants des autorités libyennes pendant ma visite. Dans l’ensemble, je pense sincèrement que nous pouvons faire avancer les choses. Et au cours de ces derniers jours, j’ai eu des entretiens avec des membres du Bureau du Procureur général, le Procureur militaire, et des membres du Ministère de la justice autour de la question de la mise en œuvre de la complémentarité et de notre obligation de travailler ensemble, pour qu’ensemble, nous obtenions des résultats, non pas pour préserver la réputation du Bureau du Procureur ou pour que la Libye respecte ses obligations au regard de la résolution, mais pour la population, pour les hommes, les femmes et les enfants libyens qui ne méritent pas moins. Hier, j’ai également rencontré ceux qui se trouvent dans l’est du pays ainsi que le Procureur militaire de Benghazi et le maréchal Khalifa Haftar. Le message que je leur ai fait passer était très clair. Je leur ai clairement fait savoir que nous avions reçu des éléments de preuve et des informations se rapportant à des allégations de crimes commis par des troupes de l’Armée national libyenne (ANL). Je leur ai dit qu’une enquête serait menée à ce sujet. En outre, je leur ai fait part des réajustements concernant les activités du Bureau en Libye. Nous essayons de renforcer l’impact de notre action en poursuivant des objectifs précis. Et que l’on soit originaire de l’est, de l’ouest, du nord ou du sud de la Libye, que l’on soit chef militaire ou cadre civil, il est absolument interdit de commettre des crimes relevant de la compétence de la Cour. Depuis Nuremberg, les chefs ou les supérieurs militaires ont l’obligation fondamentale d’empêcher que des crimes soient commis, d’en réprimer l’exécution et d’en punir les auteurs. Ceci est très clair et nous n’attendons pas de la Libye qu’elle nous fasse une faveur mais qu’elle nous apporte sa coopération  conformément aux dispositions de la résolution 1970 du Conseil de sécurité afin de nous acquitter de notre mandat.

Madame la Présidente, Excellences, je pense que, pour finir, il convient d’évoquer à nouveau la salle de Tarhuna à l’atmosphère poignante où les victimes étaient réunies autour d’une table. Une dame s’est exprimée à la toute fin alors que de nombreuses autres femmes étaient déjà parties. Elle est restée jusqu’à la fin et de manière très touchante, avec dignité même si elle avait les larmes aux yeux, des larmes que peut-être seule une mère ou un parent peut verser, elle a dit : « Alhamdulillah ... Alhamdulillah, j’accepte la volonté de Dieu. Mon fils est parti. Je peux l’accepter mais tout ce que je veux savoir, c’est ce qu’il s’est passé et où il est pour que je puisse l’enterrer. » Et dans un tel moment, que peut-on dire à une mère ? On ne peut pas bredouiller une réponse ou n’avoir que des paroles de pitié, alors j’ai marqué un temps d’arrêt. Et les seuls mots que j’avais sur les lèvres étaient ceux du Coran, la prière récitée par les musulmans : إِنَّا ِلِلَّٰهِ وَإِنَّا إِلَيْهِ رَاجِعُونَ, (Inna lillahi wa inna ilayhi raji'un) « C’est à Dieu que nous appartenons et c’est à lui que nous retournons. » Cela illustre vraiment la portée de la justice, et ce n’est vraiment pas une question de pouvoir. Il est question de personnes qui ont des exigences fondamentales : vivre en paix ; et lorsqu’elles subissent la perte d’un être cher, elles veulent savoir ce qu’il s’est passé, obtenir un minimum de justice parce que la vie de leurs proches était ce qu’il y avait de plus précieux au monde pour elles. Alors, même si l’espoir de voir justice rendue et de retrouver la paix est mince, je tiens à souligner que ce n’est pourtant pas une mission impossible. Si nous sommes disposés à nouer de nouveaux partenariats, à rechercher ensemble de nouvelles façons de collaborer, si nous sommes disposés à nous réunir autour de valeurs humaines, pas seulement de normes juridiques, même si ces valeurs juridiques découlent des valeurs humaines, alors je crois que nous pourrons faire tellement mieux pour rendre justice à la population libyenne. Et souhaitons que cela permettre peut-être de faire renaître l’espoir d’une paix durable sur cette terre ancestrale d’une grande beauté. Je vous remercie de m’avoir donné l’opportunité de m’adresser au Conseil.

سيدتي الرئيسة، أشكرك كثيرا على إتاحة الفرصة لي لإحاطة مجلس الأمن اليوم، وأود هنا أيضا أن أسجل تقديري العميق للممثل الدائم لليبيا، السفير طاهر السني لحضوره.

التقرير الرابع والعشرون: EN | FR | Arabic

إنه يوم أَغَرُّ لأنها المرة الأولى التي يخاطب فيها مدع عام للمحكمة الجنائية الدولية هذا المجلس من التراب الليبي. وهي أيضا المرة الأولى التي يزور فيها المدعي العام للمحكمة الجنائية الدولية ليبيا منذ عقد من الزمن.

وإني لممتن حقًا للدعم المقدم من بعثة الأمم المتحدة للدعم في ليبيا، وللممثل الخاص للأمين العام، عبد اللهِ باثيلي، لكرم ضيافته ودعمه خلال هذه البعثة.

ولقد أكدت تجاربي خلال هذه الأيام القليلة الماضية شيئا كان واضحا لفترة، وهو أننا بحاجة إلى نحسّن من عملنا، ويلزمنا أن نثبت أننا على قدر أكبر من الأهمية، وأن العدالة لا يمكن أن تكون قيمة، ولا يمكنها أن تكون فكرة؛ بل يلزم أن يشعر بها الشعب الليبي.

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Statement of ICC Prosecutor, Karim A. A. Khan CK, to the United Nations Security Council on the Situation in Libya, pursuant to Resolution 1970 (2011)

لقد رأينا ضحايا من جميع أنحاء ليبيا، من بنغازي، من درنة، وضحايا احتجاز، من تاجوراء أو مرزق أو تاورغاء. وقبل يومين فقط، ذهبتُ في رحلة بالسيارة استغرقت عدة ساعات من طرابلس إلى مكان يُدعى ترهونة. وهناك رأيت موقعا يبعث على الأسى؛ رأيت صناديق، صناديق معدنية، تقريبا مثل ورشة عمل. ولنا في هذه الصناديق، روايات أشخاص أُجبِروا على دخولها بظهورهم وظلوا فيها في ظروف مروعة للغاية. ظروف ترقى بكل المقاييس إلى مرتبة اللاإنسانية المقصودة. ومن هناك، سلكتُ نفس الطريق التي أُعدم فيها بعض هؤلاء المساكين، مرورا بمزارع أصبحت مقابر جماعية وأكوام قمامة، ومواقع دفن النفايات التي ألقيت فيها الجثث دون مراسم دفن. وأعتقد أنه لا يسعنا إلا أن نشيد بما قام به خبراء الطب الشرعي الليبيون من عمل شجاع حقا، وسط ذلك الركام، من نفايات البلاستيك، وكل النفايات المعروفة للبشرية، جنبًا إلى جنب مع ما رأيناه من جثث للكلاب والماعز، وكانت لهم مهمة تقنية بالغة الصعوبة تتثمل في إزالة النفايات المتراكمة للعثور على هؤلاء الأفراد الذين ألقي بهم هناك. ونتيجة لذلك، يبدو أن الجرائم تدخل في اختصاص المحكمة وتم حتى الآن العثور على 250 جثة وتم التعرف على عدد أقل بكثير. وأكدت لمكتب النائب العام ووزير العدل ودائرة الطب الشرعي أننا كمكتب على استعداد للعمل كشركاء لتقديم المزيد من المساعدة التقنية والدعم لقدرات الطب الشرعي في ليبيا، وإن بات لزاما علي أن أقول إنني أُعجبت بالجهود التي بذلوها وما أبانوا عنه في عملهم من تركيز. لكن المهمة كبيرة للغاية، وثمة حاجة إلى المساعدة بالتأكيد.

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Statement of ICC Prosecutor, Karim A. A. Khan CK, to the United Nations Security Council on the Situation in Libya, pursuant to Resolution 1970 (2011)

ومن مواقع طرح النفايات في ترهونة ذهبت إلى موقع آخر وتحدثت إلى المجني عليهم والناجين. وحول المائدة كانت هناك عينة من حالات تبعث على الحسرة. كان هناك رجل يتحدث، وأعتقد أنه فقد 24 فردا من أفراد أسرته. وفقد رجل آخر 15 فردا. وروت إحدى الأمهات قصة مؤثرة بهدوء ينم عن إباء طالما كان سمة من سمات الشخصية الليبية، وقالت إنها شاهدت أفرادا يقتحمون بيتها، وانتزعوا أبنائها منها، ولم ترهم مرة أخرى. وكان ثمة أب ذكر بكل بساطة، وبشكل مؤثر للغاية، أنه لا يستطيع تحمل العيش في بيته لأنه في ذلك البيت ولد أطفاله. وبفعل هذه الخسارة يقدح البيت في ذاكرته زناد الصدمة كل يوم. وهذا ضرب من الحسرة، وضرب من المعاناة التي يخبرنا بها الناجون. ولهذا السبب فإن إحالتكم لحالة ليبيا إلى مكتب المدعي العام والعمل، والالتزام الجماعي بتحقيق العدالة، ليس فكرة مجردة، إنه أمر مهم حقا وشأن عظيم.

ثمة حالة من الإنهاك في ليبيا. وهو شعور ما برحنا نسمع عنه. ماذا يفعل المجتمع الدولي؟ ماذا تفعل المحكمة الجنائية الدولية؟ نتحدث عن العدالة ولكننا لا نراها ولا نشعر بها. وقال أحد الناجين: ’’ما فتئنا نسمع عن العدالة، ونسمع باستمرار عن المحكمة الجنائية الدولية، أين النتائج؟ ما أحوجنا إلى أن تتحول هذه الوعود إلى واقع‘‘. وأعتقد أن هذه المشاعر لها ما يبررها تماما؛ فقد مضى وقت طويل على عام 2011 وما فتئت ضروب المعاناة تتسع ولا بد أن نحرص على أن يُنظر إلينا على أن لنا أهميةً. وهذه الرسالة لا تقتصر على ترهونة؛ فقد سمعت رسائل مماثلة من مجني عليهم من جميع أنحاء ليبيا. وشارك الفريق أيضا في التحقيقات، وسواء كان المرء من طرابلس أو بنغازي أو مصراتة أو أي مكان آخر، فإن هذه القصص يتردد صداها بقوة أكثر من أي وقت مضى.

ويريد المجني عليهم أن تسطع الحقيقة. ويريدون أن تُسمع أصواتهم. ويريدون أن يبت قضاة مستقلون ونزهاء في الادعاءات قانونيا. وإنى أفهم الآن مشاعر الإحباط هذه وأكن لها قدرا كبيرا من التعاطف. ولهذا السبب أكدت، في تقريري الأخير في نيسان/أبريل، على خريطة طريق جديدة آمل أن تسفر عن نتائج أكبر وتضفي قدرا أكبر من الشفافية على عملنا. ولا يمكننا أن نسمح بتفشي الشعور بحتمية الإفلات من العقاب. وفي نيسان/أبريل، تحدثتُ عن زيادة موارد فريق ليبيا، وتحدثتُ عن زيادة التواجد الميداني واتباع نهج ديناميكي في التحقيقات، لضمان استغلال كل فرصة لتقديم أهداف قابلة للقياس، بقدر من الشفافية. ويسعدني أن أبلغكم أنني أشرت في التقرير إلى أننا قد أحرزنا تقدما جيدا في تنفيذ هذا النهج الجديد. ويعزى ذلك في جزء كبير منه إلى الشراكة التي نسعى إلى بناءها.

وللمرة الأولى منذ عام 2011، يمكنني الإبلاغ عن حضور منتظم لموظفي مكتبي في المنطقة. وفي الفترة المشمولة بالتقرير الأخير، يمكنني أن أعلن أنه تم إيفاد 20 بعثة إلى 6 بلدان جُمعت خلالها مجموعة متنوعة من مواد الإثبات- سواء كانت صورا بالقمر الصناعي، أو أقوال شهود، أو أدلة صوتية. كما تحقق الوعد بزيادة التواصل بطرق مختلفة، بما في ذلك في حزيران/يونيه عندما جاءت نائبة المدعي العام نزهة شميم خان إلى ليبيا، واجتمعت بمسؤولين حكوميين، لكنها اجتمعت أيضا مع ممثلي المجتمع المدني - في لاهاي وتونس وفي أماكن أخرى أيضا.

وفي أيلول/سبتمبر، انضممنا إلى فريق تحقيق مشترك فيما يتعلق بالاتجار بالبشر. وأعتقد أن هذه خطوة مهمة للغاية، إلى جانب العمل الرائع الذي تقوم به إيطاليا، وهولندا، وإسبانيا، والمملكة المتحدة لبريطانيا العظمى وأيرلندا الشمالية، وكذلك وكالة الاتحاد الأوروبي للتعاون في مجال إنفاذ القانون (اليوروبول). وهذه الشراكة ليست عملية تجميلية، وليست مجرد استيفاء شكلي للشروط وتظاهر بأننا نبني شراكات. لقد نجحتْ بالفعل في جني الثمار لأنه قبل أسبوعين فقط، أي في تشرين الأول/أكتوبر، سمح فريق التحقيق المشترك هذا بنقل أفراد مهمين جدا من إثيوبيا إلى المحاكم المحلية في إيطاليا ومملكة هولندا، لعلاقتهم بتهريب الأشخاص؛ وبطبيعة الحال فإن الادعاءات التي تشمل التعذيب والاسترقاق بشكل عام يمكن أن تبت فيها الآن المحاكم المحلية. وهذا يدل على الاتساق مع ما قلته مرارا وتكرارا من أن المحكمة الجنائية الدولية ليست، في نظري، محكمة عليا، إنها مركز تنسيق. ونحن بحاجة إلى العمل معا حرصا على تقليص حيز الإفلات من العقاب وبذل جهود أكبر للمساءلة.

ولقد قدمت أيضا مقاييس شتى في نيسان/أبريل، بما في ذلك السعي إلى تسريع العمل، وإجراء تحقيق محكم، وعند الاقتضاء تقديم طلب لاستصدار أوامر قبض، بناءً على أدلة قوية. ويمكنني اليوم أن أعلن أنه يتم تقديم طلبات أخرى لاستصدار أوامر قبض إلى القضاة المستقلين في المحكمة الجنائية الدولية. ولكن هذه الطلبات تُقدَّم سرا، ولقضاة المحكمة الجنائية الدولية يؤول أمر البت فيها. ولذلك لا يمكنني الإسهاب في هذا الباب ولا يمكنني تقديم قدر أكبر من التفاصيل. ولكن سنقدم المزيد من الطلبات، لأن المجني عليهم يريدون أن يروا عملا ملموسا والأدلة متاحة والتحدي الذي نواجهه هو أن نحرص على أن تكون لدينا موارد، وأن نولي الأولوية لحالة ليبيا، لنَبُرَّ بالوعد الذي قطعه مجلس الأمن على نفسه في القرار 1970. ويمثل هذا النهج، في رأيي المتواضع، نموذجا جديدا للعمل الذي يقوم به مكتبي.

وهذا الزخم المتزايد الذي قد يتضح في التقرير لا يعزى إلى أنشطة يقوم بها المكتب بمعزل عن غيره. فليبيا شريك رئيسي، ونحن في ليبيا، وهذا البلد مِلكٌ لليبيا، والجرائم في أغلبيتها الساحقة ارتُكِبت في حق ليبيين. وهذه الشراكة التي نحاول إعادة التركيز عليها وبنائها وتعزيزها أمر محوري للغاية إذا أردنا دفع الأمور إلى الأمام. وسألتقي غدا بممثلي المجتمع المدني من مختلف أنحاء ليبيا. وفي الأسبوع المقبل، سينضم أعضاء المجتمع المدني الليبي إلى الخبراء وممثلي المجتمع المدني من جميع أنحاء العالم في المائدة المستديرة المواضيعية التي سنعقدها في لاهاي بشأن الجرائم المرتكبة ضد الأطفال والمضرة بهم. وأعتقد أنه لا يسعني إلا التأكيد على أهمية الشراكة ولاسيما، سيدتي الرئيسة، عمل معالي السيد محمد يونس المنفي، رئيس المجلس الرئاسي. فبدون قيادته، وبدون توجيهه وإزاحته للعقبات، ما كان لي أن أكون هنا في ليبيا اليوم، لأقدم هذا الإحاطة للمجلس.

إن التعاون ليس مثاليا. وقد حددنا مكامن الصعوبة، وأجريت مناقشات صريحة مع السلطات هنا في ليبيا، لكنني أعتقد بصدق أن بإمكاننا جميعا أن ندفع بعجلة الأمور إلى الأمام. وخلال الأيام القليلة الماضية، ركزت أيضا الاجتماعات التي عقدتها مع مكتب النائب العام، والمدعي العام العسكري، ووزارة العدل، على محاولة بناء التكامل، والالتزام بالعمل بشكل أفضل. لذلك يمكننا أن ننجز، ليس من أجل سمعة مكتب المدعي العام أو من أجل التزامات ليبيا عملا بقرار مجلس الأمن، ولكن من أجل الناس، من أجل رجال ونساء وأطفال ليبيا، وهذا أقل ما يستحقونه. واجتمعت أمس أيضا مع من هم في الشرق واجتمعت كذلك مع النائب العام العسكري في بنغازي وكذلك مع المشير خليفة حفتر. وهناك، كنت واضحا تماما، إذ أوضحت أننا تلقينا أدلة ومعلومات بشأن ادعاءات بجرائم ارتكبتها قوات الجيش الوطني الليبي. وقلت إنها سيتم التحقيق فيها ويجري الآن التحقيق فيها. وقد أكدت على مبدأ مشترك مفاده أنني أعيد تركيز عمل المكتب في ليبيا. ونحاول أن يكون لنا تأثير أكبر، حرصا على أن يكون بوسعنا المضي قدما لتحقيق هدف ما. وسواء كان المرء من شرق ليبيا أو من غربها، وسواء كان من شمال ليبيا أو من جنوبها، وسواء كان قائدا عسكريا أو رئيسا مدنيا، فإن ثمة حظرا مطلقا على ارتكاب جرائم تدخل في اختصاص المحكمة. وثمة التزام أساسي، يتردد صداه منذ نورمبرغ، يوجب على القادة العسكريين أو الرؤساء العسكريين منع الجرائم بل ويحتم عليهم قمعها والمعاقبة عليها عند وقوعها. وثمة وضوح مطلق بشأن هذه النقطة، ولا نتوقع التعاونَ مِنَّةٌ من أحد، ولكن عملا بالشروط الواضحة لقرار مجلس الأمن 1970، حتى نتمكن من المضي قدمًا في الولاية المنوطة بنا.

سيدتي الرئيسة، أصحاب السعادة، أعتقد أنه من الملائم في النهاية العودة، إن سمحتم، إلى تلك الغرفة المشحونة بالمشاعر في ترهونة، حيث كان المجني عليهم يجلسون حول طاولة. وتحدثت سيدة في النهاية، عندما انصرفت سيدات كثيرات أخريات، وبقيتْ حتى النهاية وبطريقة مؤثرة للغاية، وفي اتزان ولكن بعينين مُغْرَوْرِقَتَيْنِ بالدموع، ربما لا تذرفها إلا أم أو أب. قالت ’’الحمد لله... الحمد لله، أرضى بقدر الله. لقد ذهب ابني. ويمكنني قبول ذلك ولكني أريد فقط أن أعرف ما حدث وأين هو حتى أتمكن من دفنه‘‘. وفي تلك اللحظة، ماذا يمكن للمرء أن يقول لأم؟ فلا مكان للخُطب الرنانة، ولا لإبداء مشاعر الشفقة؛ ولم يسعني إلا أن أطرقتُ هنيهة. ولم أتفوه إلا بآية من القرآن يرددها المسلمون للدعاء: إِنَّا لِلَّٰهِ وَإِنَّا إِلَيْهِ رَاجِعُونَ. وهذا ما يظهر حقا الغاية من العدالة؛ فليست غايتها استعراض القوة. وليست غايتها إبراز الأقوياء. إن غايتها إنصاف أولئك الذين لا يبتغون سوى الحد الأدنى، والعيش في سلام وعندما يصابون في عزيز، يريدون معرفة ما حدث، وقليلا من الإنصاف لأن حياة أحبائهم أهم شيء في الدنيا بالنسبة لهم. لذلك، لئن قلَّ الإيمان بإحقاق العدالة، وإمكانية السلام، فإنني أؤكد أيضا أن هذه ليست بالمهمة المستحيلة. إذا كنا على استعداد لإقامة شراكات جديدة، وإذا كنا على استعداد للنظر في طرق جديدة للعمل معا، وإذا كنا على استعداد للالتحام حول القيم الإنسانية، وليس فقط حول المعايير القانونية؛ بيد أن تلك المعايير القانونية تنبثق وتنبع من تلك القيم الإنسانية، وأعتقد أن بإمكاننا القيام بعمل أفضل بكثير في تحقيق العدالة لشعب ليبيا. ونأمل أن يساعد ذلك في إفساح الأمل لسلام مستدام في هذه الأرض القديمة والرائعة جدا. شكرا جزيلا لإتاحة الفرصة لتقديم هذه الإحاطة إلى المجلس.

المصدر: مكتب المدعي العام | للاتصال: [email protected]

بيان المدعي العام للمحكمة الجنائية الدولية، كريم أ. أ. خان، محامي الملك، أمام مجلس الأمن التابع للأمم المتحدة بشأن الحالة في ليبيا، عملا بالقرار 1970 (2011)
Source: Bureau du Procureur | Contact: [email protected]