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Smiles in Carnot

Sourires à Carnot

Le long de la route qui mène au lieu de notre première réunion à Carnot, nous voyons des maisons, des bureaux où on vendait des diamants, et véhicules de luxes en ruine. Un rappel de ce qu’était la vie avant le conflit, quand l’extraction et la vente du diamant étaient au cœur de l’économie de Carnot.

Carnot est la troisième des quatre villes qui font partie de notre mission, longue de trois semaines. Toutes les quatre figurent sur la liste des lieux où des crimes auraient été commis à la fin de 2013 et en 2014, faisant désormais partie des charges retenues dans l’affaire Alfred Yekatom et Patrice Ngaïssona, eux-mêmes soupçonnés d’avoir commis des crimes graves en RCA. Deux semaines plus tôt, nous sommes partis de Bangui, la capitale de la République centrafricaine, en route pour BodaBerbérati, puis Carnot à un peu moins de 100 kilomètres au nord.

Le générateur électrique est prêt. Il nous permettra d’utiliser le matériel nécessaire à notre première séance d’informations, prévue pour 10h00. Il est 9h15 nous préparons le projecteur, l’ordinateur, les haut-parleurs et les micros, mais la grande salle de la mairie de Carnot est déjà pleine. Monsieur le maire, le Sous-préfet et le Président du Tribunal sont présents, mais aussi des personnes qui ont perdu leurs proches et leur maison.

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Smiles in Carnot

Tous les regards sont rivés sur nous. Nous distinguons de nombreuses questions dans ces regards, et quelques doutes aussi.

Après l’ouverture de la séance par le Maire de la ville, plutôt que d’expliquer ce que sont la Cour et son mandat, nous choisissons d’écouter. Nous invitons les habitants à nous dire ce qu’ils savent de la CPI et de l’affaire Yekatom et Ngaïssona. Au besoin, nous expliquons ce qui n’est pas clair.

On nous pose beaucoup de questions, notamment au sujet des arrestations. Voilà qui met en lumière un besoin d’éclaircissement sur comment la Cour fonctionne : ce qu’il se passe après que l’émission du mandat d’arrêt, ou qui collecte les éléments de preuve ; nous clarifions également le rôle des témoins et des victimes pour faire se manifester la vérité, tout ça en évitant d’utiliser un jargon technique propre à un professionnel du droit.

Plus que d'acquérir des informations et de comprendre le processus judiciaire, les habitants de Carnot avaient besoin de participer à un dialogue. Les questions sur leurs visages se sont estompées, laissant peu à peu place à des sourires.

Cette étape de notre mission a prouvé une fois de plus qu’un effort de sensibilisation continue est essentiel à la compréhension des procédures devant la CPI.

Nous commençons à sentir la fatigue après deux semaines sur la route. L’esprit d’équipe et notre détermination restent néanmoins intacts avant Yaloké, the last stop on our journey, cinq heures et 260 kilomètres plus loin.