En République démocratique du Congo, une cérémonie symbolique marque la fin de la mise en œuvre des réparations ordonnées par la CPI en faveur des victimes dans l’affaire Le Procureur c. Germain Katanga
Le 24 avril 2024, une cérémonie a été organisée à Bunia, dans la province de l’Ituri, en République démocratique du Congo, par la Cour pénale internationale (« la CPI ») et le Fonds au profit des victimes (« le Fonds »), avec le soutien du Gouvernement congolais, et en présence des ambassadeurs et représentants de la Belgique, de l’Allemagne, de l’Union européenne, du Sénégal et des Pays‑Bas, pour marquer l’achèvement de la mise en œuvre des réparations dans l’affaire Le Procureur c. Germain Katanga. Plus de 200 bénéficiaires, sur 297, y ont assisté.
Le programme de réparation mis en œuvre dans l’affaire Katanga a profité à des personnes qui ont perdu des membres de leur famille, subi un préjudice physique et psychologique, et perdu leur maison, leurs biens et leur bétail du fait de l’attaque lancée le 24 février 2003 contre le village de Bogoro dans la province de l’Ituri pour laquelle la CPI a reconnu la responsabilité de Germain Katanga en tant que complice.
« C’est la première fois que la mise en œuvre de réparations ordonnées par les juges dans une affaire portée devant la Cour pénale internationale est menée à son terme. Il s’agit donc d’une étape majeure pour le système mis en place par le Statut de Rome, mais, surtout, d’un moment important pour les survivants de l’attaque contre le village de Bogoro », a déclaré Mme Tomoko Akane, Présidente de la CPI, dans un message vidéo aux participants à la cérémonie de clôture. S’adressant aux bénéficiaires, la Présidente de la CPI a déclaré : « J’ai une grande admiration pour la dignité dont vous avez fait preuve pendant tout le processus qui s’est déroulé devant la Cour pénale internationale et j’espère sincèrement que celle-ci a réussi à vous rendre justice ».
La tenue de la cérémonie symbolique répondait aux souhaits des victimes, qui se sont constituées en comité pour préparer cet événement. Les représentants légaux des victimes, Maître Fidel Luvengika Nsita et Maître Paolina Massidda, y ont également participé. Différents spectacles ont été présentés, notamment une danse représentant les différentes traditions locales et appelant symboliquement à la réconciliation entre les différentes communautés de la province de l’Ituri, qui continue d’être le théâtre d’un conflit armé, et une représentation théâtrale donnée par des étudiants sur le thème du Statut de Rome et de la justice rendue dans son cadre à la population de Bogoro, le tout clôturé par une prière. La cérémonie a également été l’occasion d’un dialogue entre les bénéficiaires des réparations et M. Marc Perrin de Brichambaut, juge à la CPI de 2015 à 2024 qui a présidé la Chambre ayant rendu l’ordonnance de réparation.
Les participants à la cérémonie ont également pu entendre le témoignage d’un survivant et assister à un acte symbolisant l’acceptation des réparations et leur clôture, qui a consisté en une transmission de vaches en argile par les bénéficiaires aux personnes qui ont permis que les réparations se réalisent. Les vaches ont une valeur emblématique au regard de l’affaire concernée par la cérémonie car elles sont un élément central de l’identité iturienne et sont un symbole de prospérité. Elles sont également un des éléments générateurs de revenus que les victimes ont choisi de recevoir à titre de réparation.
Le montant des réparations, fixé à un million de dollars des États-Unis dans une ordonnance rendue par la CPI contre Germain Katanga, a été entièrement financé par le Fonds au moyen de ressources provenant des gouvernements d’Allemagne et des Pays-Bas, ainsi que de contributions complémentaires faites au Fonds sans être affectées à un but spécifique. Au cours de la cérémonie, S. E. M. Ingo Herbert, ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne auprès de la RDC, a déclaré que les bailleurs de fonds du Fonds au profit des victimes « souhaitent rendre hommage aux victimes et à leurs représentants légaux pour avoir apporté leur témoignage et montré à la communauté internationale comment faire participer activement les communautés locales à la planification et à la mise en œuvre des réparations ».
M. Ibrahim Yillah, Vice-président du Conseil de direction du Fonds a déclaré : « Cette cérémonie nous rappelle l’importance fondamentale de la collaboration entre les États parties au Statut de Rome, la CPI et le Fonds au profit des victimes, et traduit le profond attachement de la communauté internationale à la poursuite de la justice garantie par le Statut de Rome ».
Quelques mots sur la cérémonie
La cérémonie a été ouverte par S. E. le lieutenant‑général Johnny Luboya, Gouverneur de Bunia, et par M. Taylor Lubanga, conseiller du Président de la RDC et Point Focal National de la RDC à la CPI. La session d’ouverture a également été marquée par les messages préenregistrés de Mme la juge Tomoko Akane, Présidente de la CPI, de S. E. Mme Päivi Kaukoranta, Présidente de l’Assemblée des États parties, et de Mme Socorro Flores Liera, juge unique de la Chambre de première instance II de la CPI qui supervise actuellement la mise en œuvre du programme de réparation dans l’affaire Katanga. La cérémonie s’est déroulée en présence d’une délégation d’ambassadeurs d’États parties conduite par S. E. M. Ingo Herbert, ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne auprès de la RDC, et composée de S. E. Mme Roxane de Bildering, ambassadrice de Belgique auprès de la RDC ; de S. E. M. Nicolás Berlanga Martínez, ambassadeur de l’Union européenne auprès de la RDC ; et de Mme Evelien Boersma, chef de mission adjointe auprès de S. E. Mme Angèle Samura, ambassadrice des Pays‑Bas auprès de la RDC. Le Conseil de direction du Fonds était représenté par M. Ibrahim Yillah, son Vice‑président. S. E. Mme Ramatoulaye Ba Faye, ambassadrice du Sénégal aux Pays‑Bas, a assisté à la cérémonie en sa qualité de coprésidente du groupe de travail sur la coopération et la complémentarité mis en place par l’Assemblée des États parties.
La cérémonie et les réparations dans l’affaire Katanga ont été au cœur d’une table ronde organisée le 25 avril 2024 à Kinshasa par S. E. M. Ingo Herbert, ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne auprès de la RDC, et qui a réuni des États parties, des agences de l’ONU, des représentants gouvernementaux et de la société civile, visant à mieux faire connaître le programme de réparation en question et les autres programmes de réparation mis en œuvre en RDC.
Quelques mots sur les réparations ordonnées par la CPI dans l’affaire Katanga
À la suite de l’ordonnance de réparation rendue par la Chambre de première instance II de la CPI en 2017 et confirmée en appel en 2018, des réparations ont été mises en œuvre entre 2017 et 2023. Au cours des deux premières années, chaque personne a reçu une indemnisation symbolique de 250 dollars des États-Unis. Entre 2018 et 2023, sur la base des préférences exprimées par les victimes, celles présentes dans la province de l’Ituri ont reçu des réparations collectives sous la forme d’une aide au logement, d’une aide à l’éducation pour elles-mêmes ou les personnes à leur charge et d’un soutien à une activité génératrice de revenus. Les victimes ne résidant pas en Ituri n’ont pas bénéficié de ces modalités mais ont reçu de l’argent liquide. Toutes les victimes résidant en Ituri ont également reçu un soutien psychologique en 2023. La mise en œuvre de ces réparations s’est achevée et le Fonds a fait rapport à la Chambre de première instance II sur cette clôture en octobre 2023.
Pour plus d’informations sur le Fonds au profit des victimes, vous pouvez contacter le Fonds à l’adresse [email protected] ou consulter son site Web www.trustfundforvictims.org. Vous pouvez aussi suivre les activités du Fonds sur X, LinkedIn, et Facebook.