Déclaration: 22 janvier 2024

Déclaration du Procureur de la CPI, Karim A.A. Khan KC, à l’occasion d’une conférence sur la lutte contre la cybercriminalité par le biais du Statut de Rome

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Statement by ICC Prosecutor Karim A.A. Khan KC on conference addressing cyber-enabled crimes through the Rome Statute system

Aujourd’hui, mon Bureau a eu l’honneur d’accueillir une conférence novatrice sur la lutte contre la cybercriminalité par le biais du Statut de Rome. Rassemblant plus de 100 participants, dont 12 entreprises spécialisées en cybersécurité et technologies de l’information à la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye, ce forum marque une nouvelle étape importante et concrète dans l’exploration d’un domaine qui n’a pas encore fait l’objet d’un examen attentif, à savoir la cybercriminalité dans le contexte du droit pénal international.

Comme je l’ai déclaré dans Foreign Policy l’année dernière, les cybercrimes peuvent relever de la compétence de la CPI lorsque les conditions énoncées dans le Statut de Rome sont remplies, et mon Bureau peut enquêter sur de tels actes et en poursuivre les auteurs. L’un de nos objectifs prioritaires cette année consiste à élaborer une politique définissant l’approche du Bureau à l’égard de cette problématique émergente, en s’appuyant sur notre engagement auprès de tous les partenaires concernés.

Dans un premier temps, la conférence d’aujourd’hui a examiné les répercussions concrètes de l’utilisation abusive du cyberespace pour commettre des crimes graves au regard du Statut de Rome, tels que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, ou en faciliter la commission. Les cyberattaques, comme celles qui visent des infrastructures civiles, peuvent avoir un impact profond sur les vies humaines.

Dans mes remarques liminaires, j’ai souligné que, de par sa nature, la pratique du droit pénal international s’est souvent penchée sur le passé. Or, il est impératif de se tourner vers l’avenir et de se préparer de manière adéquate pour lutter contre les formes de criminalité émergentes. Il nous incombe de le faire pour toutes les catégories de victimes et de communautés touchées par des comportements interdits par le Statut de Rome, ce qui implique d’identifier l’ensemble des formes de criminalité et des moyens utilisés pour en faciliter la commission. 

Organisée conjointement avec Microsoft, cette table ronde a permis de mobiliser l’expertise de spécialistes et d’entreprises du secteur des technologies de l’information, ainsi que les connaissances et l’expérience de nos partenaires de longue date issus de la société civile, du monde universitaire, des États, des organisations internationales et du monde judiciaire. Elle témoigne concrètement de l’importance d’établir des partenariats et de les renforcer dans nos efforts de lutte contre les cyberopérations qui transcendent souvent les frontières, les juridictions et les spécialisations.

Durant les débats, les experts ont abordé des thèmes tels que les menaces numériques les plus récentes, l’impact de la cybercriminalité sur les droits de l’homme, la justice et l’établissement des responsabilités, l’utilisation de l’intelligence artificielle à des fins de désinformation, les opérations d’influence étrangère, la surveillance numérique et les cyberattaques destructrices, avant d’aborder le rôle potentiel de la CPI dans la lutte contre la cybercriminalité.

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Statement by ICC Prosecutor Karim A.A. Khan KC on conference addressing cyber-enabled crimes through the Rome Statute system

Les fruits de cette conférence contribueront à l’élaboration de la politique générale relative à la cybercriminalité, qui sera lancée cette année, à laquelle s’ajouteront de nouvelles politiques générales relatives aux crimes d’esclavage, aux crimes contre l’environnement, ainsi qu’à la complémentarité et la coopération. Ces politiques s’inscriront dans le prolongement de nos nouvelles politiques générales relatives aux crimes liés au genre et aux enfants publiées récemment. La somme de ces efforts reflète l’engagement stratégique du Bureau à améliorer notre cadre politique, à veiller à ce qu’il réponde aux défis contemporains et, surtout, à mettre toutes les chances de notre côté pour tenir nos promesses dans la salle d’audience.

À l’avenir, mon Bureau entend accroître ses efforts visant à moderniser ses opérations tout en accordant la priorité à la cybersécurité et à la sécurité des données. À la suite du lancement du projet Harmony, notre plateforme de gestion des éléments de preuve, le Bureau s’emploiera à consolider ses données dans le cloud, à mettre en œuvre des systèmes de gouvernance des données et à mobiliser l’IA et l’apprentissage automatique pour renforcer l’intégrité de ses données. 

Je tiens à remercier Microsoft de s’être associé à nous dans ce travail crucial et d’avoir apporté son soutien à l’organisation de l’événement d’aujourd’hui. Je suis également extrêmement reconnaissant aux diverses entreprises, institutions, experts et participants qui ont partagé leur temps et leurs contributions. Grâce à une collaboration étroite, j’ai bon espoir que nous puissions collectivement veiller à ce que la justice ne soit pas dépassée par les mutations auxquelles nous assistons aujourd’hui et l’évolution des moyens utilisés pour faire la guerre. 

Source: Bureau du Procureur | Contact: [email protected]