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Photo Memories

Une mémoire photographique

Tout ce que je vois, ce sont des vaches sur la colline et des bergers qui s'occupent de leur troupeau. Pete, quant à lui, voit les derniers rayons de soleil caresser la campagne géorgienne, et de nombreuses histoires familiales à raconter.

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Le Pete en question est Pete Muller, un photographe primé de National Geographic. En novembre dernier, il était en Géorgie pendant une semaine, pour mettre en images des récits pour l'exposition « La vie après un conflit » de la CPI. Ces histoires sont celles de personnes affectées par des crimes qui auraient été commis en août 2008, dans et autour de la région d’Ossétie du Sud, qui fait désormais partie des enquêtes du Procureur de la CPI.

En tant que responsable de la sensibilisation au bureau de pays de la Cour en Géorgie, je travaille avec des personnes vivant dans des villages éloignés, qui ont trouvé un logement temporaire dans des communautés pour les personnes déplacées. Je partage des informations sur les enquêtes et les affaires qui les concernent directement et j'essaie de donner accès à la justice aux victimes, si elles souhaitent exercer leurs droits devant la CPI. Je suis en Géorgie au sein de l'équipe qui s'efforce de responsabiliser et informer, écouter. Pete est venu en Géorgie pour recueillir l'essence de ce qu’est la vie après un conflit.

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La scène du coucher du soleil que j'ai mentionnée s'est déroulée à Prezeti, une communauté de personnes déplacées nichée en haut des montagnes, une zone entourée de pâturages. L’élevage, en particulier des animaux de pâturage, est l'une des principales activités des habitants. En bas de la colline, une dame âgée guide son bétail vers les étables. En haut de la colline, nous apprécions les paysages et Pete prend des photos de bergers locaux. Le soleil est déjà couché et nous sommes à table, sans électricité mais éclairés par des bougies, en train de dîner avec une famille qui s'est réfugiée temporairement à Prezeti, au lendemain du conflit. Ils partagent leurs récits, Pete prend des photos à la lueur des bougies, ses clichés préférés de ce jour-là.

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En une semaine, nous avons rencontré les bergers de Prezeti, les agriculteurs de Koda, et les enfants de Shavshvebi qui bénéficient d'un programme d'assistance psychosociale. Travailler avec les victimes signifie instaurer la confiance, une relation que Pete a établie dès le début. Il est venu avec le cœur ouvert et des connaissances sur le conflit ; les habitants étaient très touchés. Pour briser la glace, en particulier avec les enfants, parfois timides ou anxieux, Pete montrait des photos des endroits qu'il avait visités, expliquant où et comment elles avaient été prises. Il a fait preuve d’une sympathie et d’un intérêt sincères et a écouté les difficultés de la vie après un conflit, souvent assis à la table des personnes qui nous nous recevaient chez elles, immortalisant leurs réalités sur papier photo, autour d'un morceau de pain frais, de fromage et de vin faits maison.

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Au final, ce voyage s'est transformé en quelque chose d'inoubliable pour tout le monde : les membres de la communauté ont donné une visite guidée à Pete, lui racontant leurs vies ou les expériences de leurs amis et voisins pendant le conflit. « J'étais agriculteur. Elle était enseignante. Ils ont « le mal du pays ». Il veut rentrer chez lui. … » Autant d’histoires racontées à Pete. Tout le monde a fait de son mieux pour donner au photographe le temps et l'opportunité de prendre la meilleure photo.

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Les récits et les photos ont été le cœur de ces visites. Pendant que Pete créait de nouveaux souvenirs, les anciens ressortaient les rares albums photo qui avaient survécu à la guerre. La plupart des albums et des biens familiaux ont été perdus, cependant, partis en fumée avec les maisons. La valeur des souvenirs réside dans ce qu’ils nous rappellent d’un parent, de notre histoire personnelle, de qui nous sommes en tant que personne. Les perdre, c'est comme perdre une partie de soi.

Pendant une semaine en Géorgie, Pete Muller a photographié les récits de la vie actuelle de personnes affectées par le conflit. Ces photos montrent les difficultés et les petits plaisirs de leurs journées, leurs conditions de vie réelles et dressent des portraits psychologiques. La hâte et l'enthousiasme exprimés par tout le monde, m’ont laissée avec l'espoir que cet effort apporterait un peu de guérison et de baume au cœur des gens que nous avons rencontrés. Si tel était le cas, alors la  mission serait accomplie.