Communiqué de presse: 2 septembre 2019

Situation relative aux navires battant pavillons comorien, grec et cambodgien : la Chambre d'appel de la CPI rejette l'appel du Procureur

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La juge Solomy Balungi Bossa, juge présidente pour le prononcé de l'arrêt de la Chambre d'appel de la Cour pénale internationale du 2 septembre 2019 au siège de la Cour à La Haye, aux Pays-Bas © ICC-CPI

Le 2 septembre 2019, la Chambre d'appel de la Cour pénale internationale (« CPI » ou « la Cour »), la juge Solomy Balungi Bossa présidant sur cet appel, a rendu son arrêt et a rejeté l'appel du Procureur contre la décision de la Chambre préliminaire I relative à la demande de révision judiciaire présentée par le gouvernement de l'Union des Comores du 15 novembre 2018. L'arrêt de la Chambre d'appel a été pris à la majorité, le juge Chile Eboe-Osuji et la juge Luz del Carmen Ibáñez Carranza, ayant rendu des opinions partiellement dissidentes.

Pour contexte, le 14 mai 2013, le Bureau du Procureur avait reçu un renvoi des autorités de l'Union des Comores, Etat partie au Statut de Rome, concernant une attaque le 31 mai 2010 par les forces de défense israéliennes contre un navire d'aide humanitaire à destination de la bande de Gaza. Le 6 novembre 2014, le Procureur a publié sa décision de ne pas enquêter sur l'attaque. Le 16 juillet 2015, la Chambre préliminaire I a demandé, à la majorité, au Procureur de la CPI de revoir sa décision de ne pas ouvrir d'enquête concernant cette attaque. Le 29 novembre 2017, le Procureur a publié une décision, qu'elle considérait comme définitive, réaffirmant sa décision antérieure du 6 novembre 2014, de ne pas enquêter sur cette attaque. Le 15 novembre 2018, la Chambre préliminaire I a ordonné au Procureur de réexaminer sa décision du 6 novembre 2014 de ne pas enquêter sur cette attaque à la lumière des instructions précises de la décision de la Chambre préliminaire du 16 juillet 2015. Le Procureur a ensuite fait appel de cette décision.

L'arrêt de la Chambre d'appel confirme aujourd'hui la décision de la Chambre préliminaire I du 15 novembre 2018, à l'effet que le Procureur doit reconsidérer sa décision sur le renvoi des Comores, au plus tard le 2 décembre 2019, à la lumière des instructions précises de la Chambre préliminaire énoncées dans la décision du 16 juillet 2015 et des instructions de la Chambre d'appel dans son arrêt. La Chambre d'appel a néanmoins souligné, les juges Eboe-Osuji et Ibáñez ayant des opinions dissidentes, que la « décision finale » d'ouvrir, ou non, une enquête revient au Procureur.

Raisonnement juridique

La Chambre d'appel a estimé que la Chambre préliminaire I n'a pas commis d'erreur en examinant si une décision par Mme le Procureur, prise suite à une première demande de révision et considérée par elle comme « définitive », constituait en effet une « décision définitive ». La portée de l'examen de la Chambre préliminaire dans ce cas se limite à déterminer si le Procureur a procédé ou non à la révision en conformité avec la demande de la Chambre préliminaire.

La Chambre d'appel a également noté que le Procureur était tenu de démontrer comment elle a abordé les questions pertinentes à la lumière des instructions de la Chambre préliminaire. Elle a également indiqué que, lorsque des questions de droit se posaient, la seule interprétation faisant autorité était celle adoptée par les juges de la Cour. En outre, le Procureur doit se conformer, sur ordre de la Chambre préliminaire, et tenir compte de certaines informations disponibles en vue de déterminer s'il existe une base factuelle suffisante pour ouvrir une enquête. Cependant, La majorité de la Chambre d'appel, les juges Eboe-Osuji et Ibáñez ayant des opinions dissidentes, a souligné qu'il n'appartient pas à la Chambre préliminaire d'indiquer au Procureur comment évaluer ces informations et quelles conclusions factuelles elle devrait prendre. La Chambre d'appel a conclu que le Procureur n'a pas suivi les interprétations juridiques de la Chambre préliminaire et que la Chambre préliminaire n'a donc pas commis d'erreur en décidant d'ordonner au Procureur de procéder à une nouvelle révision de sa décision de ne pas enquêter.

La juge Ibáñez Carranza a joint une opinion séparée et partiellement dissidente. Elle se concentre sur i) l'étendue du pouvoir que le Statut de Rome a attribué aux Chambres préliminaires pour assurer la poursuite de crimes odieux dans les cas où le Procureur décide de ne pas enquêter, et l'étendue de ce pouvoir, y compris le mandat de révision découlant de l'article 53-3-a ; ii) dans le contexte d'un contrôle juridictionnel et conformément à une demande de réexamen judiciaire, la nouvelle décision du Procureur ne peut pas constituer un dernier mot ; et iii) le Procureur est tenu de se conformer à la détermination de la chambre et suivre sa ratio decidendi. La juge Ibáñez Carranza a conclu que le Procureur est tenu de respecter les décisions de la Chambre préliminaire et de respecter le ratio decidendi, en particulier les interprétations du droit et leur application aux faits concernant les cinq erreurs identifiées dans la Décision du 16 juillet 2015.

Judgment on the appeal of the Prosecutor against Pre-Trial Chamber I's 'Decision on the "Application for Judicial Review by the Government of the Union of the Comoros"'

Partly Dissenting Opinion of Judge Eboe-Osuji

Separate and Partly Dissenting Opinion of Judge Luz del Carmen Ibáñez Carranza

Photographies de l'audience

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Pour toute information complémentaire, veuillez contacter Fadi El Abdallah, Porte-parole et Chef de l'Unité des affaires publiques, Cour pénale internationale, au +31 (0)70 515-9152 ou +31 (0)6 46448938 ou à l'adresse [email protected].

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