Déclaration: 8 mai 2014

Déclaration du Procureur de la Cour pénale internationale, Fatou Bensouda, à propos du rapt de lycéennes au Nigéria

Je trouve profondément choquantes et inquiétantes les informations faisant état de l'enlèvement présumé de plus de 200 lycéennes dans l'État de Borno, au Nigéria, et l'annonce encore plus récente du rapt d'autres lycéennes dans la semaine. De tels actes choquent la conscience de l'humanité et pourraient constituer des crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI). 

Je m'associe pleinement à la détresse infinie des parents des jeunes filles enlevées, et partage leur espoir que les efforts de recherche et de sauvetage mis en œuvre au niveau national aboutiront au retour rapide de leurs enfants en toute sécurité. Une aide internationale devrait rapidement être mise à disposition pour consolider ces efforts, conformément à la requête des autorités nationales. 

Le phénomène inquiétant consistant à cibler des personnes de sexe féminin en période de conflit, cette fois-ci dans l'État de Borno, ne saurait être toléré et doit cesser. Il ne faut négliger aucune piste pour que les responsables de telles atrocités répondent de leurs actes devant la justice au Nigéria ou à la CPI. 

Je tiens à exprimer ma solidarité vis-à-vis des familles des lycéennes enlevées et du peuple nigérian.  Ces jeunes filles doivent être libérées immédiatement pour leur permettre de retrouver, saines et sauves, leurs communautés et leurs familles. 

Contexte

La situation au Nigéria fait l'objet d'un examen préliminaire ouvert par le Bureau du Procureur de la CPI depuis 2010. En août 2013, le Bureau a publié un rapport dans lequel il a conclu qu'[il existait une base raisonnable de croire que] le groupe Boko Haram commettait les crimes de meurtre et persécution constitutifs de crimes contre l'humanité depuis juillet 2009. Les informations qu'a pu recueillir le Bureau donnent à penser que la fréquence et l'intensité des attaques attribuées à Boko Haram, s'agissant notamment d'enlèvements de femmes et de filles et d'esclavage sexuel, se sont fortement accrues depuis janvier 2014. Certains crimes présumés commis par Boko Haram constitueraient également des crimes de guerre, dans la mesure où le Procureur a récemment conclu que la situation constituait un conflit armé non international.

Le Nigéria étant un État partie au Statut de Rome, la CPI peut exercer sa compétence s'agissant des crimes de guerre, crimes contre l'humanité et actes de génocide commis sur le territoire de ce pays ou par ses ressortissants à partir du 1er juillet 2002. Ayant conclu que certains crimes présumés commis dans le cadre de la situation au Nigéria relevaient de la compétence ratione materiae de la CPI, le Bureau du Procureur examine actuellement les procédures nationales pertinentes engagées conformément au principe de complémentarité. Au vu des dispositions du Statut de Rome, il revient en premier lieu aux autorités nigérianes d'enquêter à propos des crimes présumés et d'en poursuivre les responsables. Toutefois, la CPI pourrait être saisie à un stade ultérieur pour connaître de telles affaires si aucune enquête ou poursuite véritable n'est entamée au Nigéria, ou si les autorités nationales compétentes n'ont ni la volonté ni la capacité de le faire.

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Source: Bureau du Procureur | Contact: [email protected]